Filmer avec un infini respect : Pastorales électriques, de Ivan Boccara, en Haut-Atlas marocain.
Pastorales électriques est le troisième film que Ivan Boccara, cinéaste franco-marocain, tourne dans les montagnes de l'Atlas, en pays berbère. Auparavant, il nous avait offert Mout Tania, balade au sein d'une communauté en autarcie, et le remarquable Tameksaout, portrait d'une bergère octogénaire à qui on ne la fait pas.
Ivan Boccara prend tout son temps pour filmer l'arrivée de l’électricité et de la route qui l'accompagne. Sur une période de huit ans, il filme le long processus d’électrification de la montagne et témoigne des bouleversements de cette société pastorale. Il faut voir la séquence inaugurale de mise en place d'un pylône, un chef-d'œuvre d'intelligence et d'efficacité au pays des Aït Débrouille, justement ! Des gens qui n'ont rien, et qui vous offrent tout. Des bergers qui côtoient la mort et en font un long poème. Des jeunes filles joueuses qui rêvent d'un ailleurs en technicolor. .
On ne racontera pas la suite, il faut la découvrir entre deux thés à la menthe, offerts par des gens qui ne sont pas naïfs face au progrès, mais qui entrevoient au contraire tous les changements inéluctables que l'arrivée de l'électricité entraîne : inégalités, factures en hausse, endettement, exode vers la ville qui scintille au loin. Il faudrait retenir les enfants de ce pays aride, mais la vie en décidera sans doute autrement ?
Ivan Boccara ne se permet pas de nous apporter une réponse unique, mais il prend le temps de filmer, de nous suggérer, sans intrusion aucune et avec un immense respect pour ce peuple berbère. Respect, donc.
Interview d' Ivan Boccara.