Anuktatop, la métamorphose : droits culturels en Guyane, chez les Wayanas.
Anuktatop, la métamorphose, est un de ces films qui mettent beaucoup de temps à arriver jusque chez nous et sur le site BED. Mais le jeu en vaut largement la chandelle. Eté 2023, je découvre le film sur une plate-forme audiovisuelle en basque, qu'une amie d'Euskadi m'a indiquée. Je tombe par hasard sur le film, sous-titré en basque, évidemment, et me laisse happer par les images, sans rien comprendre du texte, evel just ! Commence alors l'enquête pour retrouver Nicolas Pradal, co-réalisateur du film avec Pierre Selvini. Une longue conversation de presque une heure me convaincra que j'ai bien fait d'insister. J'entends au bout du fil la passion et la détermination de Nicolas. Il a voulu que les Wayanas, peuple autochtone installé sur le Haut-Maroni, en Guyane, s'approprient la caméra, et tournent eux-mêmes leurs récits oniriques. "Un exercice de longue haleine, dit-il, mais j'y ai pris goût, puisque nous avons ensuite tourné à cinq un documentaire sur les rituels du deuil chez les Wayanas, Kawaï na ana. Je prends tout le temps qu'il faut, je ne conçois pas les choses autrement", rajoute Nicolas avec une tranquille conviction. On le sent bien dans le film, qui nous emmène tout en douceur au fil de leurs rêveries et de leurs transes.
A partir de là, Nicolas me renvoie vers David Crochet, sociologue de formation, toujours en recherche d'altérité, et sa magnifique association Chercheurs d'autres, basée à la fois en Guyane à Papaïchton, et à Toulouse en Occitanie. L'association est dédiée aux échanges et transmissions de patrimoines - amoureux du PCI, allez jeter un œil sur leur site ! Expositions, ateliers, projections tout au long du fleuve Maroni, mais aussi à Toulouse, comme pour le projet IDEM, mené en 2020 et 2021. IDEM a fait voyager et travailler ensemble des jeunes du Brésil, de Guyane , du Bénin et d'Occitanie, pour l'explorer l'histoire commune de la traite négrière et du commerce triangulaire, entre le XVème et le XIXème siècles ( 12,5 millions de déportés africains, on oublie trop souvent ce chiffre monstrueux ).
Associer les habitants au processus de création, donner aux contributeurs la capacité d'agir, autant de credos que nous partageons à BCD. Nous vous invitons donc à regarder Anuktatop, avec en arrière-plan, toutes ces considérations sur les droits culturels, et le rythme du fleuve Maroni qui vient frapper à vos tempes. Bonne projection, et merci à tous d'avoir pris le temps !